Dans la rubrique des faits divers…
Un jeune homme assassine sa fiancée et se tue ensuite ; un militaire camerounais se donne la mort à Salak ; une jeune fille se suicide au quartier Nsam ; une autre tente de se suicider après son échec au BEPC ; une femme saute du pont de la Dibamba avec son bébé dans les bras ; un médecin généraliste est retrouvée pendue dans sa chambre à Bertoua … Eh oui ! Longue est la liste d’histoires de suicide comme celles-ci qui peuplent malheureusement la rubrique des faits divers de nos médias camerounais. Des faits divers !! C’est à ça que se réduisent ces tranches de vie interrompues, voire brisées.
Le suicide puisque c’est de ça qu’il s’agit, n’ayons pas peur de le dire est un triste fait, un tueur silencieux qui fait beaucoup plus de victimes que les guerres et les génocides selon l’OMS. Selon cette dernière ; toutes les 40 secondes, une personne se suicide et toute les trois secondes, une autre essaie d’en finir avec sa vie. OUI ; oui vous avez bien lu ! Toutes les 3 secondes ! Vous imaginez ? C’est grave ! Et ça ; c’est pour des cas qui ont été répertoriés, disons-nous bien que tout autour de nous, dans les maisons ; dans les familles ; ça arrive encore et encore et on n’en entend peut être parler que le jour où le pire arrive.
En général, ce qu’on entend dire de la personne qui s’est suicidée ou qui a essayé de le faire, c’est qu’elle est « lâche ; faible ; égoïste ». Il existe peut-être une part de vérité dans toutes ces explications, mais l’autre majeure partie de la réalité est toute autre. En effet, on ne parle presque jamais de la souffrance de ces personnes, de leur état d’esprit ; de leur santé mentale. La plupart du temps, on ne voit que l’acte posé, ses implications ; le mystère autour, le scandale ; le regard des autres sur la famille.
Le suicide, pourquoi ?
Souffrance, douleur ; mal être profond ; tristesse ; solitude ; détresse, désespoir et fatigue sont le ressenti des personnes qui arrivent à penser au suicide. Evidemment, elles se sentent mal dans leur peau , il est donc tout à fait clair que si une personne en arrive à avoir idées suicidaires ; c’est vraiment qu’il y a quelque chose qui ne vas pas ; mais alors pas du tout.
Alors, qu’est ce qui cause ce mal-être chez l’autre ? Qu’est ce qui peut bien justifier qu’un individu ne veuille plus vivre ?
De manière générale, s’il est vrai qu’il n’existe pas de cause précise à l’origine des idées suicidaires chez quelqu’un, il faudrait tout de même relever des facteurs de risques, des terrains propices qui pourraient conduire au suicide. C’est par exemple :
- une maladie mentale comme la dépression ; le trouble bipolaire ou une schizophrénie. La souffrance causée par ces maladies est très difficile à vivre pour la personne affectée
- un état de stress post traumatique chez un militaire par exemple dont l’esprit ne supporte pas les horreurs de la guerre après sa mission
- des difficultés à entretenir des relations personnelles et amoureuses stables à long terme
- des pertes significatives dans la vie de la personne (décès d’un être cher, perte d’un emploi ; rupture amoureuse ; divorce)
En milieu jeune ; ça pourrait être :
- violences familiales ; maltraitance ; abus sexuels
- harcèlement scolaire ; intimidation ; cyber intimidations avec des diffusions de vidéos humiliantes pour la victime par exemple.
- une douleur physique ou émotionnelle grandissante et insupportable ; aggravée par le sentiment d’être seul et sans soutien
- une maladie chronique qu’on n’accepte pas et avec laquelle on va devoir dorénavant vivre
- une grossesse non désirée chez la jeune fille avec toutes les connotations négatives qu’on a ici chez nous, particulièrement au sein de la famille camerounaise.
- addiction aux drogues
Pour toutes ces raisons, vous verrez que ce ne sont pas toujours les mêmes causes qui produisent les mêmes effets, mais ce sont des potentiels déclencheurs chez des personnes fragiles.
De ce fait, l’entourage doit être attentif à l’adulte ; à l’enfant avec lequel il vit. D’autant plus, qu’ici chez nous, on n’a pas la culture de laisser un mot, une lettre avant le passage à l’acte pour expliquer son geste. Ainsi, la famille est encore plus en état de choc ; plus dans le désarroi devant la disparition de la personne, se demandant comme elle n’a rien vu venir ; se reprochant de n’avoir pas fait çi ou ça …Même si par le passé, on n’a pas pu empêcher le pire, on peut désormais savoir ce qui devrait attirer notre attention et nous faire réagir pour venir en aide à la personne.
Quelques signes avant-coureurs…
Alors, j’ai souvent entendu au sein de l’entourage ; on savait qu’elle ne se sentait pas bien ; mais de là à se suicider ! Elle n’a rien montré ; rien n’a changé chez elle on ne comprend pas ! Et pourtant, la personne peut présenter les signes suivants :
- une baisse d’interaction avec la famille et les amis, l’isolement ;
- tristesse qui s’installe dans la durée ;
- perte d’intérêt pour les choses qui nous faisaient plaisir ;
- amotivation, manque d’énergie ; troubles du sommeil, perte ou prise de poids ;
- allusions régulières à la mort ou au suicide dans les causeries ou par écrit ;
- comportements à risque (abus de substances, drogue ; alcool ; rapports sexuels non protégés, partenaires sexuels multiples) ;
- perte de l’estime de soi et dévalorisation (se sentir nul ; inutile ; incapable, avoir l’impression de ne rien réussir ou de ne rien accomplir, avoir le sentiment de ne compter pour personne) ;
- avoir en sa possession des moyens létaux comme les pesticides ; javel ; pétrole, médicaments ;
- des antécédents de tentative de suicide ;
- la mise en ordre de ses affaires ; ou le partage de ceux-ci à d’autres personnes
Il faut cependant relever qu’une personne suicidaire ne présente pas forcément des signes d’abattement ou de morosité, souvent une hyperactivité et une énergie débordante (sortir tous les soirs ou se jeter à corps perdu dans le travail) peuvent aussi masquer un profond désespoir.
Prévention: que faire pour aider ?
C’est vrai qu’à première vue ; on pourrait penser que parler de suicide avec une personne suicidaire va encore lui donner plus de mauvaises idées ! Au contraire, cela lui permettrait d’évacuer au fur et à mesure les sentiments qui la maintiennent dans cet état d’esprit ; et de prendre un peu de distance par rapport à la confusion qu’elle ressent. Et d’un autre côté ; cela nous permettrait (entourage ; proches) d’évaluer le risque de suicide et le danger que court la personne.
- Il faut commencer par en parler, n’ayons pas peur de prononcer le mot suicide, d’aborder le sujet avec la personne. Dites-vous bien, que si elle envisage cette solution face à ses problèmes, ça veut dire qu’elle doit être prise au sérieux.
- Etre à l’écoute de la personne sans jugements, reconnaître sa souffrance lui permet réduire le sentiment de solitude qu’elle ressent et la soulage un peu du poids de sa douleur
- Ne pas tourner autour du pot ; poser directement la question en essayant d’avoir plus de détails (depuis quand elle y pense ? comment elle compte s’y prendre ?). Lui manifester de l’intérêt lui permet de voir qu’elle n’est pas seule et nous permet de saisir l’ampleur de sa détresse.
- N’oublions pas que les tentatives de suicide sont des appels au secours ; soyons attentifs et essayons de convaincre la personne de demander de l’aide professionnelle le plus rapidement possible.
Aux proches qui ont vécu une tentative de suicide ou un suicide.
Avec le stress causé par les temps qui deviennent de plus en plus difficiles et les charges du quotidien ; il n’est pas toujours évident de voir tous les signes évoqués plus haut chez un enfant ou un adulte.
Tout d’abord, se sentir coupable est normal face à une épreuve pareille ; les « si j’avais vu ; j’aurai dû » ne peuvent plus rien changer. Il ne sert à rien de se blâmer ou de chercher un coupable pour quelque chose qu’on n’aurait pas pu contrôler ; pour quelque chose qui n’avait pas forcément un lien avec nous ou qui n’était pas contre nous.
Ensuite, on se doit par contre d’être plus attentifs ; d’être plus disponibles et plus ouverts ; de chercher de l’aide le plus tôt possible ; de faire attention à ce qu’on dit ou à ce qu’on fait face à nos enfants et face à nos proches ; parce le mal être n’est pas toujours visible et on ne peut pas savoir ce que l’autre traverse.
A toi qui y pense…
Oui, toi qui est en train de lire cet article ; toi qui souffre ; qui te sent mal dans ta peau ; qui n’en peux plus de faire semblant de sourire et qui n’y arrive plus parce qu’à l’intérieur tu te sens brisé (e) ; épuisé (e) ; toi qui te dis que ce serait tellement mieux de ne plus rien ressentir ; de ne plus être un fardeau pour personne ; de s’endormir et de ne plus se réveiller…Oui toi qui pense à la mort comme solution à tous tes problèmes.
Saches que tu n’es pas seul(e), tu comptes pour ta famille, ton entourage a encore besoin de toi ; il y a d’autres solutions ; il y a de l’espoir. Je ne sais pas ce que tu traverses, ni prétendre savoir à quel point c’est dur, mais je sais que si tu es encore là ; c’est que tu as tenu bon malgré tout. On meurt tous un jour ; c’est un passage obligé ; mettre fin à tes jours sera peut-être un point final à toute la souffrance que tu ressens ; mais c’est sûr que t’ôter la vie t’enlèvera toutes les possibilités que tu as de de te sentir mieux et de vivre quelque chose de différent, de meilleur.
Ne reste pas seul , parles en à quelqu’un ; demande de l’aide ; permet à l’autre d’être là pour toi ; de te tenir la main comme tu l’as fait pour lui. Accroches toi…
S’il est vrai que nous n’avons pas encore de centre d’écoute ou de ligne téléphonique pour aider de manière efficace les personnes suicidaires, nous avons des amis ; de la famille ; des proches et quelques professionnels de la santé qui ne demandent qu’à aider. Alors, parents ; frères et sœurs, amis ; collègues de travail ; personnel soignant dans les hôpitaux ; communauté religieuse ; administrateurs de page sur les réseaux sociaux ; soyons vigilants et attentifs parce que c’est possible de prévenir le suicide et d’aider la personne concernée à retrouver l’envie de vivre.
Prenez soin de vous… Samuella Mon Psy Online.
Mots clés: suicide, détresse psychologique, mal-être, soutien psychologique, prévention du suicide
Crédits photos : Unsplash
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Je suis Samuella NOUMEDEM, psychologue clinicienne basée à Douala au Cameroun et je réponds au +237 679972937. Cliquez ici pour me retrouver sur Whatsapp : wa.me/237679972937.