Vivre dans une famille dysfonctionnelle…

Zoom sur images…

 La famille… Première société qui nous accueille, premières personnes qui nous aiment, premières identifications, premières projections sur nos rapports avec les autres. C’est le tout premier cocon, l’endroit où l’on se sent en sécurité pour aller vers l’extérieur. Mais comme pratiquement tout sur cette terre, la famille est loin d’être parfaite, elle fait souvent mal ; met souvent en colère, fatigue et épuise ; et c’est aussi tous ces petits couacs qui la rendent attachante malgré tout et qui participent à la beauté des liens qui se créent. Ce n’est malheureusement pas  le cas pour toutes les famille; et vivre dans une famille dysfonctionnelle en est un bel exemple.

En regardant de plus près, vous verrez une maison dans laquelle, les rapports sont perpétuellement sous haute tension quand ils ne sont pas noyés dans une souffrance et une tristesse sourde. Par exemple, une maison où ce n’est qu’en l’absence d’un/des parents que la maison reprend vie parce que sa/leur présence est synonyme d’accusations infondées, de critiques incessantes; de disputes à répétitions, de dictature ; de violences physiques et/ou verbales…

C’est encore comme autre exemple, un endroit où tout doit être parfait,  le moindre écart étant sévèrement puni, la rigidité existante ne laissant pas de place à l’expression des besoins réels ; poussant les membres à vivre dans un refoulement constant de leurs envies, se repliant sur eux-mêmes avec beaucoup de colère contenue ; parce que n’ayant pas la liberté ; la possibilité de s’affirmer et de s’opposer.  Avoir la peur au ventre à chaque fois qu’on doit rentrer à la maison est un indice parmi tant d’autres.   

C’est par exemple ce qui se passe avec un père de famille violent physiquement et/ou verbalement ; et/ou psychologiquement qui délaisse ses responsabilités familiales, ne s’occupe plus de rien dans la maison (encadrement, relationnel, charges financières), mais attend du respect et de l’affection de son épouse et de ses enfants qu’il maltraite pourtant.

D’un autre côté, on peut avoir un parent (homme comme femme) qui s’occupe de tout financièrement parlant, mais qui utilise cette position pour manipuler, faire chanter ; culpabiliser et contrôler les autres membres de la famille. Quelqu’un qui se perçoit comme le centre de la famille, le pilier ; dicte tout, et quand les choses ne se passent pas comme il veut, il punit sévèrement, coupe les vivres, se mettant tout le reste de la famille à dos ; et se plaignant ensuite d’être détesté. On va observer d’un côté ; un ou deux membres qui le suivront malgré eux au risque de taire leurs besoins réels, et étouffer de frustrations ; et d’un autre côté ; d’autres qui oseront dire la vérité ; s’affirmer au risque de se voir traiter de mouton noir et être exclu de la famille.

Le choc émotionnel est intense (incompréhension, remise en question, douleur, culpabilité, idéalisation douloureuse, colère, mépris, refoulement) ; et  vient du fait que les personnes qui sont censées vous aimer et vous protéger, sont celles qui agressent, qui vous exposent au danger extérieur.

C’est par exemple un parent qui vend tout dans la maison pour pouvoir jouer au parifoot, qui vole vos petites économies sans état d’âme pour boire ses bières ; qui dit ne rien vous imposer, mais dès que vous essayez de suivre votre voie ; il vous rabaisse, ne vous donne plus l’argent de poche, ou ne finance plus vos études ou encore ; un parent qui ne vous demande rien, mais prend le nouveau téléphone, est content du fait que vous remplissiez le frigo alors que êtes mineur.e ;sans poser de questions sur la provenance de tout ça. Et le pire, c’est que vous devez accepter ça et le vivre comme quelque chose de normal ! Vous l’aurez compris, il y a tellement de schémas différents…

Qu’est-ce que c’est ?

Une famille dysfonctionnelle est donc une famille au sein de laquelle le déséquilibre ou la mauvaise santé mentale d’un ou des deux parents, crée des conflits, des mauvais comportements, des négligences et même des abus envers le conjoint ou les enfants ; de manière régulière. Ceci va pousser les membres de la famille, et surtout les enfants à intégrer ces attitudes anormales comme étant normales. Ici chez nous, on va entendre dire d’une telle famille qu’on a « gaté »le parent au village, ou qu’on lui a posé comme « condition », celle détruire sa famille, mais ça c’est une toute autre histoire …

La famille commence donc à dysfonctionner quand le conjoint et/ou les enfants sans le vouloir, commencent à normaliser et même à « couvrir » les écarts de comportement du parent toxique (quand ils ne le sont pas tous les deux). On s’habitue à subir, à voir, entendre des choses « bizarres », négatives qui ne sont pas normales, mais dont on ne peut en parler, ni entre nous et surtout pas aux autres. Ce qui entretient la honte, la culpabilité pour les uns ; la rancœur, l’amertume et le mépris pour les autres ; et qui nourrit l’atmosphère malsaine qui règne au sein de la famille.

Il faut noter que les mauvais rapports au sein d’une famille ne font pas forcément de cette dernière, une famille dysfonctionnelle ;  mais il est clair qu’il est difficile, voire douloureux d’en faire partie. Les effets négatifs sur les plans physique, affectif, relationnel ; sur la santé mentale en général sont indéniables et peuvent aboutir à une cassure définitive (si rien n’est fait) des liens, causée par des blessures émotionnelles profondes.

Quelques causes…

Voici quelques pistes qui pourraient expliquer le dysfonctionnement au sein d’une famille :

  • une mauvaise santé mentale ou un trouble de la santé mentale chez les parents
  • avoir un ou deux parents toxiques
  • des épreuves de la vie qu’on n’arrive pas à surmonter de manière saine comme la perte d’un emploi, un divorce, un décès…
  • le fait d’avoir soi-même grandi dans une famille dysfonctionnelle et de n’avoir pas guéri de ses propres blessures

Quelques signes…

  • la violence prédomine dans les rapports : verbale (mots blessants, critiques, insultes) , physique, psychologique (chantage, manipulation, humiliation, tendance à culpabiliser), sexuelle, économique.
  • le retrait de la vie commune à cause de l’impossibilité d’en parler sans problèmes : chacun va se replier sur lui-même ce qui va renforcer l’isolement et la tristesse des membres de la famille.
  • la volonté de tout contrôler de la part du/des parent.s ; en faisant culpabiliser les enfants si ils ne se laissent pas faire ; par exemple vivre sous le diktat d’un parent autoritaire et rigide
  • le manque d’empathie et la manipulation émotionnelle : les parents sont indifférents aux besoins affectifs de l’enfant ; et utilisent l’affection des enfants envers eux contre ces derniers. Par exemple, « tu parles comme ça à qui ? » ou «tu ne réponds pas ? comment tu peux être aussi méprisant ? »
  • la présence d’un membre « symptôme », c’est-à-dire un enfant ou un parent qui va manifester le mal-être familial : un parent qui tombe malade, fait une dépression, enchaîne les troubles psychosomatiques ; ou une enfant qui aura des troubles du comportement (fugue, décrochage scolaire, addiction à un drogue ou à un comportement, petits délits…)
  • des conflits permanents : des cris ; des crises de colère, des dispute sans raison valable qui vont empoisonner l’atmosphère et qui peut pousser certains membres de la famille à s’éloigner et même à couper les ponts
  • la parentification : il peut arriver qu’un enfant prenne le rôle d’un parent et essaie tant bien que mal d’assumer des responsabilités qui sont trop lourdes pour ses épaules. On a souvent vu des adolescentes se faire « entretenir » ou se prostituer  parce que c’est elle qui devait gérer les charges familiales ; tout ceci à cause soit de l’absence, de l’alcoolisme, de la toxicomanie ou de la dépendance aux jeux de hasard de ses parents.
  • La présence des non – dits : ne pas pouvoir parler de ce qui se passe puisque la communication est impossible et qu’on va être perçu comme l’enfant insolent, ne pas pouvoir exprimer ses sentiments et ne pas pouvoir se confier à une tierce personne parce qu’on a honte, et qu’on va invalider notre vécu d’enfant sont aussi des éléments présents dans une famille dysfonctionnelle. Ces non-dits peuvent être alimentés à tort par des valeurs culturelles mal comprises comme « le respect des aînés », « la place du père », « la mère nourricière », avec des phrases comme « même si elle fait quoi c’est ta mère ! »
  • L’infantilisation : des parents qui vous empêchent de prendre toute initiative ; qui veulent que vous soyez toujours dépendant d’eux…
  • L’insécurité constante : on sait tous qu’un enfant a besoin de stabilité pour bien grandir ; ici c’est le contraire ; on est toujours aux abois ; toujours dans l’attente du pire.

Résultat !

On va se retrouver avec des enfants insécures, timides, rebelles, instables sur plan émotionnel qui n’auront pas pu développer une image et une estime de soi solides pour nouer des rapports sains avec les autres.

Ça peut être un adulte qui va avoir des comportements « auto-saboteurs » chaque fois qu’il sera en train de vivre quelque chose de normal à cause de sa peur du bonheur, et du fait qu’il ai imprimé le dysfonctionnement comme seul mode de fonctionnement. Un adulte qui pourra souffrir des blessures d’enfance comme le rejet ou l’abandon et développer une dépendance affective dans ses rapports avec les autres.

Par ailleurs, des difficultés psychologiques et des troubles de la santé mentale peuvent apparaitre sur le long terme : névroses, dépression, anxiété, troubles psychosomatiques, difficultés relationnelles, répétition du schéma familial jusqu’au niveau de son propre cercle familial…

L’être humain étant complexe, ce n’est pas le cas de tout le monde. Malgré les blessures, les enfants sont dotés d’une grande capacité de résilience. Souvent, il arrive qu’un membre de la famille, l’autre parent, le frère/la sœur ; une personne externe réussisse à tisser un lien fonctionnel avec les enfants, ce qui leur permettent d’avoir un autre modèle et d’adopter des comportements favorables à leur équilibre.

Au-delà des apparences…

Il s’agit de faits, de tristes faits vécus par de nombreuses familles qui ne sont finalement que des familles, groupe d’êtres humains en souffrance, et qui ont besoin d’aide. Une thérapie familiale est indispensable pour pouvoir s’en sortir. C’est vrai qu’il faut tenir compte des spécificités culturelles pour qu’elles n’entravent pas le suivi.

Le psychologue et/ou le psychothérapeute pourra donc accompagner la famille afin qu’elle développe des outils de communication adaptés et efficace. Il pourra faire des propositions qui vont permettre aux membres de se comprendre mutuellement et nourrir un climat émotionnel positif. Le thérapeute mettra aussi en place des limites claires et saines entre les membres, pour qu’ils apprennent à reconnaitre et à stopper les dynamiques nocives avant qu’elles ne deviennent destructrices.

On n’est pas condamné à être malheureux parce qu’on on a grandi dans une famille pareille. Il est important d’en prendre conscience que l’on soit un parent ou un enfant, pour améliorer les attitudes qui entretiennent le dysfonctionnement. Et parce qu’on n’est pas égaux devant la douleur, on peut essayer de renforcer ses ressources personnelles pour vivre le plus sainement possible malgré ces antécédents. Chacun selon sa réalité et sa résilience peut donc choisir de s’éloigner pour préserver son équilibre ; renforcer l’unité de la fratrie pour construire la résilience du groupe. Trouver une aide professionnelle adaptée en individuelle ou en groupe est aussi une solution.

Prenez soin de vous, Samuella Mon Psy Online.

PS: Pour ceux qui sont fan de cinéma ou de séries, vous pouvez regarder la série américaine SHAMELESS pour avoir un aperçu en gardant à l’esprit que la réalité dépassera toujours la fiction.

Tags : famille, relations familiales, famille dysfonctionnelle, parents toxiques, parentification ; résilience, thérapie familiale

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Je suis Samuella NOUMEDEM, psychologue clinicienne basée à Douala au Cameroun et je réponds au +237 679972937. Cliquez ici pour me retrouver sur Whatsapp : wa.me/237679972937.

Vie de famille : Parent toxique, oui; ça existe

Comment c’est possible ?

Oui, les personnes toxiques existent, négatives , manipulatrices, difficiles, égoïstes, se plaignant tout le temps, soufflant le chaud et le froid dans la relation. Et même dans la famille, on peut en retrouver, une mère, un père, un frère, une soeur, un oncle, une tante, un mari, une femme… ça fait encore plus dégâts justement parce que c’est la FAMILLE.

Ce sont des personnes qui sont déséquibrées, parfois malades et nous allons en faire les frais à un niveau ou à un autre.

Des membres de la famille qui vont nous rendre malade physiquement et mentalement, qui sont susceptibles de nous asphyxier financièrement, si nous ne faisons pas attention, si nous n’arrivons pas à fixer des limites ou alors à nous éloigner…

Des proches qui sont des videurs d’énergie, qui empoisonnent la santé émotionnelle, parce que nous devons passer le temps à vivre selon leur humeur, au détriment de nos besoins et continuer à faire comme si de rien n’était… Continuer à respecter, cotôyer, vivre avec, prendre soin , s’occuper, payer le loyer, les frais médicaux, « aimer » cet autre là qui nous détruit et qui nous traite avec mépris.

Résultat : douleur, frustration, conflits constants, tension permanente, non dits, tabous, colère, irritabilité, agressivité, tout ceci dans le refoulement, qui finit pas rejaillir sur le corps, (prise ou pertes de poids, troubles alimentaires, hypertension etc…), sur l’humeur, sur le comportement.

Que faire ?

Des pistes pour s’en sortir malgré tout :

  • Savoir que c’est pas parce que c’est la famille, qu’on doit tout supporter,
  • On ne peut pas déranger les autres quand on est épanoui et heureux, les personnes toxiques sont malheureuses,en souffrent inconsciemment et font donc souffrir les autres
  • Admettre que le sang ne veut plus rien dire à partir du moment où l’autre se sert de ce lien pour vous faire souffrir permanenment
  • Décider que tout ce qui nuit continuellement à votre équilibre, votre santé physique et mentale n’a pas de place dans votre vie même si c’est la famille
  • Accepter la réalité, et trouver la force de continuer à faire sa part si on en a la possibilité, sans rien attendre en retour et sans culpabiliser si on n’y arrive pas
  • S’éloigner pour pouvoir souffler et se reconstruire si on a la possibilité
  • Pardonner, c’est un processus, même si c’est dur, honnêtement, ce n’est que ça qui va nous aider à avancer, et à panser petit à petit les blessures.

#Kameni a dit #nayonayo, « man no go die because family dey, on ne va pas mourir à cause de la famille »

Vous pouvez réécouter cet article en version audio dans notre rubrique Podcast « Prenez soin de vous  » ici.

Prenez soin de vous…Samuella, Mon Psy Online

Mots clés : parent toxique, famille dysfonctionnelle

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Le deuil périnatal : Revenir les bras vides …

Revenir les bras vides d’une maternité après la perte d’un enfant, voilà un événement courant,mais très particulier. Pour le comprendre, il faut tout d’abord rappeler que venant du latin « dolus » ; « dolore », le mot deuil signifie douleur, souffrance dans l’âme. Cette souffrance, cette déchirure que les mots ne peuvent expliquer face à la mort d’un proche. C’est donc un processus d’adaptation suite à la perte d’un être cher, qui comporte des étapes qui se vivent différemment en fonction de la particularité de chaque être humain. On parle alors du travail de deuil pour petit à petit gérer ce flot d’émotions, d’histoires et de souvenirs que provoque la disparition du proche.

Que se passe- t-il lorsque à une naissance,  un moment qui matérialise la vie dans toute sa splendeur, la mort survienne ? Comment expliquer qu’à ce moment-là, ce soit plutôt le corps inerte et sans vie d’un petit être dont on a pourtant senti les mouvements énergiques ? Ce petit être qui grandissait  dans notre utérus, que l’on chérissait, qui faisait déjà partie de notre vie, comment expliquer qu’avant d’arriver au terme de la grossesse il ne soit plus ?

A peine connaissions nous ce tout petit, qu’il s’en allait déjà quelques jours ou quelques mois plus tard ; nous laissant sous le choc, désemparés, désespérés ? Ainsi, comment vivre avec ce contre sens, ces réalités contre nature qui frisent l’absurdité que sont le décès périnatal et donc le deuil périnatal ?

Le deuil périnatal,qu’est-ce que c’est ?

Le décès périnatal est la mort d’un bébé qui survient au cours de la grossesse, lors de l’accouchement ou dans sa première année de vie. On parle alors de deuil périnatal pour faire référence au deuil vécu par les parents lors du décès de leur bébé.

OUI ; revenir les bras vides est une tragédie que malheureusement de nombreuses familles ; de nombreux couples et même des personnes célibataires vivent partout autour de nous. C’est une situation insoutenable qui laisse les personnes affectées dans l’incompréhension ; ne sachant quoi dire, que faire et vers qui se tourner. De plus, cela nourrit le silence, le malaise et le mal-être tout autour ; rendant la situation taboue et aboutissant au fait que personne n’en parle dans les hôpitaux, dans la famille et dans les médias. Il est pourtant très important d’en parler pour aider et accompagner les parents endeuillés, pour former le personnel soignant  à améliorer sa prise en charge dans ce type de situation et pour sensibiliser les proches sur la conduite à tenir.

Par ailleurs, ce qui rend encore la situation plus difficile, c’est le fait pour l’entourage de penser que la peine est proportionnelle  au nombre de semaines de vie du bébé ! Pour faire simple, c’est croire qu’une femme qui a fait une fausse couche à deux mois de sa grossesse sera moins affectée que celle qui a tenu son bébé mort-né dans les bras !

Ce qui est faux ! La manière dont on vit la perte est influencée par notre histoire, notre vécu, notre désir d’enfant et tout ce qu’on projette dans notre maternité…C’est beaucoup plus complexe que ça. Comme tout deuil ; c’est très difficile ; ça l’est encore plus quand il s’agit d’un bébé dont la vie s’arrête avant d’avoir commencé.

Revenir les bras vides, pourquoi c’est si dur ?

Tout d’abord,dans notre culture, l’enfant n’appartient pas qu’au couple, mais aussi à tout le reste de la famille, ce qui agrandit la douleur ressentie. Il y a aussi la grande famille, que dira-t-on aux grands-parents, tantes, cousins et cousines ? Ces derniers ne sachant d’ailleurs pas quelle attitude adopter, n’aborderont presque jamais le sujet de peur de réveiller la douleur des parents. Que dire aux autres enfants de la maison ? Comment réagir face à ce berceau vide et à toute la layette qu’on a préparé pour attendre notre petit bout de chou ? 

Ensuite, comment se comporter avec le conjoint ? Toi qui a besoin de lui ; besoin de voir son chagrin pour mieux le soutenir ; besoin de parler de ce qui s’est passé pour pouvoir  avancer; lui qui pense devoir être fort pour vous deux en ne laissant rien paraître, en évitant le sujet par peur de te voir craquer ; en se réconfortant comme il le peut, mais loin de toi…En outre, comment rester soudés dans cette épreuve et empêcher que le vide causé par l’absence de votre tout petit ne finisse par vous éloigner l’un de l’autre ?

Enfin, comment  gérer sa santé physique, ce corps qui a bel et bien porté un enfant qui n’est  plus  là ; ce corps dont  la moindre douleur, la montée laiteuse ; les cicatrices  post opératoires nous rappellent  jusque dans notre chair  la présence passée et la présente absence de notre bébé ??

Il est vrai qu’avec  toutes les avancées dans le domaine médical, les médecins ont le moyen de mieux suivre l’évolution du bébé anticipant ainsi tout danger et permettant au même moment  aux parents de le voir grandir et donc de s’y attacher. C’est cet état de choses qui accroît encore le désarroi des parents au moment du décès. Voilà autant de questions qui soulignent la profonde difficulté du deuil périnatal au sein d’une famille.

Le deuil périnatal, quelques réactions observées…

Comme pour tout autre deuil ; on va :

  • Etre sous le choc ; puis nager en plein déni ; se dire que ce n’est pas vrai ;
  • Avoir mal, très mal quand on va réaliser que c’est vrai et se sentir coupable. J’aurai dû faire plus attention, aller à l’hôpital plus tôt. ..
  • Ressentir de la colère contre soi- même ; contre les autres ; imputer la responsabilité à d’autres facteurs (hôpital ; travail ; famille, etc…)
  • Déprimer, rester centré (e) sur sa douleur ;
  • Se reconstruire malgré la douleur,  recommencer à s’ouvrir à de nouvelles choses ;
  • Accepter ; avancer et reprendre le cours normal de sa vie malgré la perte.

Chez la femme…

Le décès périnatal dans un couple est douloureux pour tout le monde,  mais le ressenti n’est pas le même. On observe donc, chez la femme,  des réactions plus intenses à cause du lien affectif plus fort qui grandit pendant la grossesse. Elle peut:

  • avoir une sensation d’échec, se sentir honteuse ou coupable de n’avoir pas pu mener sa grossesse à terme (encore plus avec les connotations auxquelles renvoie la maternité dans la culture africaine)
  • douter de sa capacité à concevoir et ressentir de l’anxiété face à une prochaine grossesse
  • ressentir un vide et avoir l’impression d’avoir perdu une partie d’elle-même
  • avoir l’impression d’avoir déçu son conjoint et son entourage

Chez l’homme…

Couramment négligé, il est tout autant affecté que sa partenaire et aura un vécu différent du deuil périnatal ; il peut:

  • justement  se sentir isolé parce que l’attention est dirigée vers sa femme
  • se sentir  impuissant
  • avoir le sentiment d’avoir échoué dans  son rôle de protecteur e de pourvoyeur de la famille

Toutes ces réactions ne sont pas les mêmes partout, mais peuvent nous aider (entourage , personnel soignant) à comprendre les parents endeuillés pour ensuite mieux les accompagner.

Le deuil périnatal,jusqu’où ça peut aller ?

Le deuil -et tout son cortège d’émotions- constitue un ensemble de réactions normales face à la perte d’un être cher. Cependant dans le cas du décès périnatal, le choc de l’annonce du décès, s’il n’est pas bien géré et bien accompagné, peut avoir des conséquences graves sur la santé et le quotidien des personnes endeuillées.

Dans certains cas, l’enfant a été le fruit de plusieurs années d’attente ; d’espoir ; d’allées et venues dans les hôpitaux ; la seule possibilité d’être mère ; de renforcer son estime de soi en tant que femme

Dans d’autres cas encore, sa venue symbolisait retrouver sa féminité à travers sa maternité ; redorer son honneur au sein de la belle famille, consolider sa relation avec son homme ; avoir un enfant leur permettait de passer de l’identité de couple à  celle de parents , étape importante pour certains dans la maturation d’une relation à long terme.

Ce sont donc la nature et l’intensité des liens tissés avec le bébé ; et la signification consciente et surtout inconsciente que cette grossesse a pour les parents qui déterminent la gravité du deuil qui survient.

Quelques séquelles dans la vie des personnes affectées…

Après tout ce qui a été dit plus haut, voici pourquoi perdre un enfant de cette manière reste un traumatisme qui peut :

  • conduire à un deuil pathologique ; c’est-à-dire que la personne reste bloquée à une étape de son deuil un peu plus longtemps que la normale ; ça peut être le déni par exemple, refuser la réalité et y rester figé ;
  • causer une dépression ; le sentiment de tristesse ayant perduré et s’étant installé avec un profond sentiment de culpabilité ; la douleur devenant le seul lien avec le bébé parti trop tôt.
  • induire l’isolement, le repli sur soi, l’évitement des situations sociales dans la crainte de « craquer »
  • provoquer des troubles psychosomatiques, c’est à dires des malaises physiques qui trouvent leur origine dans le mal être psychologique de la personne : insomnie ; maux de tête ; douleurs musculaires ; maux d’estomac ; hypertension ;etc …
  • entraîner une perte de l’estime de soi sur un plan personnel, douter de son corps,  de sa capacité à donner la vie. Et sur un plan collectif, les parents peuvent développer un sentiment de honte et d’échec  par rapport à leur capacité à concevoir une enfant « vivant » face au regard de autres, surtout si il y a des antécédents de deuils non résolus. Ce qui à la longue va occasionner une anxiété qui sera nocive pour les prochaines grossesses, dans le cas où les pertes ont été consécutives.
  • créer un vide dans la relation du couple, des difficultés à communiquer, des manières différentes de gérer le chagrin qui aboutissent souvent malheureusement dans des cas extrêmes à une séparation ou un divorce ; le couple n’ayant pas pu s’en remettre.

Il est donc absolument nécessaire d’aider et d’accompagner ses parents tant sur le plan physique que psychologique pour prévenir les conséquences potentiellement dramatiques de la perte de leur enfant sur leur vie ultérieure.

A éviter !

C’est par exemple penser que de dire certaines phrases aux parents va apaiser leur douleur. Elles peuvent s’illustrer comme suit :

– « c’est pas grave ; vous ne l’avez pas connu !  C’était son destin ! Vous avez d’autres enfants ! »

– « Vous allez en faire un autre et ça ira mieux ! » ; alors qu’un  enfant ne remplace pas un autre.

Ou encore, essayer de trouver mille et une explications au décès, refaire le film encore et encore ne va pas les soulager.

Que faire ?

Au personnel soignant ; il n’est pas facile d’annoncer une mauvaise nouvelle à un patient que l’on a suivi, mais c’est notre responsabilité de le faire et de proposer un minimum de suivi ; dans l’attitude empathique et des paroles bienveillantes. Innover en créant des groupes de parole ou de soutien dans nos maternités pour sensibiliser sur une triste réalité qui est traumatisante pour bien des personnes et dont il est difficile de s’en remettre sans aide.

A l’entourage ; la famille joue un grand rôle dans la communauté africaine. Ce n’est pas facile de savoir comment se comporter, mais il faut être présent sans être envahissant ; ne pas avoir peur d’en parler ; d’appeler le bébé par son nom si l’occasion se présente et rester dans l’attitude de soutien. Car, en parler c’est permettre à la personne affectée de se libérer petit à petit de sa tristesse, de son sentiment de culpabilité et de sa colère. C’est l’aider à prendre un peu de distance par rapport à ses émotions ; c’est les valider et marquer l’existence de ce petit être de manière positive.

Soutenir, c’est rester à l’écoute de la douleur des parents,  pleurer avec  eux ;  ça peut être leur rendre visite, leur faire à manger ou les inviter. C’est aussi respecter leur peine ; il y en a qui ne voudront pas en parler, qui voudront  avoir un moment pour eux, il faudra donc savoir rester en retrait. Si l’on ne sait pas quoi dire ou quoi faire, on peut le leur demander clairement pour éviter de les blesser par maladresse.

A vous les parents, les « paranges » sous d’autres cieux, il faudra se soutenir mutuellement ; être présent l’un pour l’autre ; en parler ; ne pas réprimer ses émotions ; les laisser nous envahir et puis les laisser repartir. Faire ensemble si possible le rituel de l’enterrement pour dire au revoir au bébé ;  faire une boîte à souvenirs par exemple avec les affaires du bébé, le célébrer le jour anniversaire,  se raccrocher à sa foi (pour ceux qui sont croyants) sont autant  de petites choses qui peuvent vous aider à faire votre deuil progressivement ; et à trouver la force pour continuer à vivre avec sans vous laisser submerger par le chagrin. Chercher des responsables ; trouver des boucs émissaires, vous blâmer  vous apaisera peut être sur le moment, mais cela ne vous le ramènera pas.

IL mérite que vous viviez, que vous appréciez davantage ce que vous avez et que vous soyez heureux. Vous l’avez attendu et porté chaque minute de sa vie, et vous l’aimerez chaque instant de la vôtre.

Prenez soin de vous…Samuella, mon psy online.

Mots clés: deuil périnatal, décès périnatal, deuil, travail de deuil.

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Je suis Samuella NOUMEDEM, psychologue basée à Douala au Cameroun et je réponds au +237 679972937. Cliquez ici pour me retrouver sur Whatsapp : wa.me/237679972937.