Pour que sa fille n’ait pas à vivre ce genre d’épreuve, elle a préféré lui raconter son histoire en dessins. Un témoignage qui concerne beaucoup de femmes.
Publié le 28 septembre 2018 sur Positivr.fr |Mis à jour le sur Positivr.fr
Avant, quand Fanny Vella voyait une femme en couple avec un homme violent et méprisant, elle ne comprenait pas. Ça la faisait « hurler ». Et puis un jour, ce fut son tour : elle a elle-même partagé la vie d’un homme violent et méprisant, et, longtemps, elle a été incapable de le quitter… Une mésaventure douloureuse qu’elle raconte aujourd’hui en dessins avec beaucoup de lucidité et de talent.
Cette histoire, Fanny Vella a d’abord souhaité la raconter pour que sa « toute petite fille » ne tombe pas dans le même piège. Et puis, avec le temps, ses dessins ont commencé à circuler de plus en plus. Pas étonnant : ils parlent à de nombreuses autres femmes vivant ou ayant vécu la même chose.
(Dessins reproduits avec l’aimable autorisation de Fanny Vella.)
Si ce genre d’épreuves se répète sans cesse pour des millions de femmes, c’est parce qu’on n’en parle pas assez, parce qu’on les cache. Avec ce témoignage touchant et juste, Fanny Vella contribue à briser le tabou et, ainsi, à lutter contre ce fléau. Bravo!
Si c’était aussi simple de PARTIR, on n’en serait pas là, d’où l’intérêt de soutenir au maximum toutes les femmes qui passent par là, au lieu de les juger et de leur donner l’impression que c’est de leur faute. Avec de l’aide, une thérapie adaptée, on peut guérir de ses blessures, retrouver peu à peu son estime, se reconstruire et avancer pour s’épanouir à nouveau.
Avez-vous besoind’informations, d’orientation ou d’un suivi psychologique? Pour retrouver des psychologues à votre écoute, cliquez ici : https://www.monpsyonline.com/les-experts/
Je suis Samuella NOUMEDEM, psychologue basée à Douala au Cameroun et je réponds au +237 679972937. Cliquez ici pour me retrouver sur Whatsapp : wa.me/237679972937
J’avais entre 4 et 5 ans. Je ne sais plus vraiment. Ma mère a toujours été une mère présente, vigilante avec une compréhension presqu’instinctive que dans le regard de l’autre, moi fillette, biologiquement dotée d’un vagin, pouvait toujours être un objet de désir – peut importe mon âge. Elle était donc toujours aux aguets.
Elle l’était d’autant plus que 1 à 2 ans plus tôt, j’ai dû subir des agressions sexuelles dont je n’avais aucun souvenir mais qui ont provoqué des troubles de la santé et du comportement et nécessité un suivi médical de plusieurs mois. Mais là, ma mère me croyait en sécurité.
Jamais elle n’a soupçonné que sa nièce adulte et en vacances chez nous, se servait de moi pour ses expériences sexuelles. Je me rappelle qu’elle m’a montré des images pornographiques. Je me rappelle qu’elle a dit de faire pareil. Je me rappelle de la pénétration avec les doigts. Je me rappelle qu’il ne fallait pas le dire. Je me rappelle que cela a continué pendant tout son séjour de …… je ne sais pas. À cet âge là, le temps est une notion étrange. La suite, pour moi a été de considérer que c’était la norme. Qu’ainsi devaient se passer les choses. J’ai été exposé à d’autres. Pendant longtemps j’aurais plutôt dit je me suis exposée à d’autres attaques sexuelles. Certains adultes ont peut être vu l’enfant troublé que j’étais et ont tenu leurs places d’adultes. D’autres – face à une enfant qui ne fuyait pas le danger comme elle aurait dû, comme le prescrit notre culture, en ont profité. Il y a eu d’autres « doigtés », des demandes de fellations face auxquelles j’ai obtempéré.
Jusqu’à ce jour où, ma mère nous a surpris, reproduisant tout ca avec un petit garçon de mon âge. Elle ne s’est pas posée beaucoup de questions. Les coups furent ce jour là comme une pluie tropicale: féroces et intenses. Je ne me rappelle pas une partie de mon corps qui ait trouve grâce. Mon père entendant mes pleurs est venue demander ce qui motivait une telle punition. Après les explications de ma mère, il a estimé que décidément, il n’avait pas plu encore suffisamment. Je ne sais pas ce qui leur déplu le plus. L’expérimentation elle même, la réalisation que j’en étais l’instigatrice, ou peut être les deux. En tant que mère de deux enfants que je protège férocement, je sais aujourd’hui avec certitude qu’à cet âge là , (je devais avoir moins de 7 ans quand tout ceci s’est passé,) les enfants ne s’engagent pas dans des activités sexuelles de cette nature avec d’autres à moins d’avoir été exposé à des images, des expériences auxquelles ils n’auraient pas dû. L’ainé de mes enfants a un âge plus avancé que celui que j’avais au moment des faits et je garde jalousement sa petite bulle d’enfant.
À ceux qui disent – mais pourquoi les victimes ne disent rien, pourquoi on ne se débat pas? Pourquoi on ne raconte pas? « Nevigbegle » – Je réponds, les enfants ne naissent pas « gbéglé ». Et leurs réactions varient d’une personne à une autre. J’ai subi d’autres agressions sexuelles plus tard qui m’ont laissé « gelée » comme si tout cela arrivait à une personne autre que moi. Bien des fois, je me suis retrouvée la gamine de 4-5ans déphasée, dépassée par ce qui se passait. Le pire, c’est que plus tard et pendant longtemps, je me suis engluée dans des relations sans queue ni tête. Plus lui était insaisissable, compliqué, plus il faisait des coups tordus, plus j’étais accroc….. poursuivant inlassablement, le cycle de violence contre moi ; un cycle dans lequel j’étais devenue, finalement, mon propre bourreau.
Puis il y a eu la prise de tête amoureuse de trop. Ce n’était même pas, vu mon historique amoureux de l’époque, une humiliation particulièrement blessante. C’était juste celle de trop. Mon corps s’est mis à pleurer des larmes que je ne savais littéralement pas arrêter. Je mettais des glaces sur mes yeux bouffis pour aller au boulot et tenir la journée pour rentrer le soir et laisser libre cours aux chutes du Niagara. Je venais d’avoir une promotion importante, j’étais tout le temps en train de voyager. De l’extérieur, je cochais toutes les cases de réussite sociale et professionnelle mais à l’intérieur l’auto-combustion avait atteint son paroxysme.
Il m’a fallu 25 ans pour révéler ce que je pensais être ma première attaque – celle par la nièce de ma mère. Ma mère m’a dit – et je présume que c’était sa façon de s’excuser- qu’elle avait mal réagit le jour où elle m’a surprise avec le petit garçon. Elle m’a surtout révélé que ce n’était probablement pas ma première agression sexuelle. Les psy qui m’avaient suivi durant mes troubles du comportement lui avaient dit que j’avais subi probablement une ou des agressions sexuelles mais que vu mon âge, il était fort possible que je n’avais pas les mots pour dire mes maux. Tout cela s’est probablement produit au « jardin d’enfants » au moment où j’avais entre 2 et 3 ans. Et je n’en ai aucun souvenir.
Des années de thérapie m’ont permis de me réparer, de trouver des mots pour exorciser mes traumas, crever les abcès vieux de 25 ans et les voir se transformer en larmes sans fin. Il y a des techniques pour aller chercher et former les souvenirs que votre cerveau s’est obstiné à ne pas former. Le psychothérapeute a insisté pour que je ne le fasse pas. L’absence de mémoire m’a t-il dit est un mécanisme de protection quand notre corps comprend presqu’instinctivement qu’il y a des traumas dont on ne peut se relever. J’ai toujours un rapport compliqué avec mon corps – que j’ai malmené à souhait – et longtemps trimballé comme une carcasse dont je ne savais vraiment pas réellement que faire. Ma sexualité d’adulte – au sein de relations consenties – fut problématique pendant longtemps. J’y travaille toujours. Mon rapport au toucher – pas simplement sexuelle – est tout aussi problématique. Mes proches savent qu’il ne faut pas trop me toucher, certainement pas sans me prévenir. Ça a toujours été conçu comme moi et mes bizarreries.
Agresser un enfant, c’est hypothéquer son avenir parce que vous ne savez jamais quels chemins prendront les mécanismes de reconstruction de soi, de l’estime de soi, de son identité, de son rapport au corps. Bref, l’agression rend la construction de soi et de son rapport à l’autre extrêmement compliquée. Agresser un enfant, c’est l’affubler de « démons » avec lequel il ne cessera de se débattre toute sa vie durant. Mes cicatrices sont là, imperceptibles pour vous de l’extérieur, mais pour moi, très présentes. J’ai appris á vivre avec la zone d’ombre que mon cerveau a crée pour que je puisse survivre, cassée, blessée, meurtrie mais vivante. Parfois, c’est le plus important : vivre ou survivre. J’ai survécu à tout cela, grâce á une combinaison extraordinaire de ma propre résilience, un travail incessant sur moi même, grâce à une famille – et une mère – formidable (sa réaction était une erreur terrible comme nous le faisons tous à un moment ou à un autre dans l’éducation de nos enfants) des auteurs de livres qui sans le savoir m’ont littéralement tenu la main de façon invisible. Je suis la, femme noire, Africaine, debout, reconstruite, dans une relation épanouie, le regard tourné vers l’avenir. (Le travail de reconstruction s’est fait avant la rencontre. Je n’aurais pas pu entrer dans une relation saine, si je n’avais pas pris le temps de me poser et de faire ce travail énorme sur moi même.)
À vous tout.e.s mes co-survivantes, Je vous salue vous tout.e.s, vous dont l’innocence a été volée trop tôt. Vos victoires ont été mes victoires. Vos paroles de dénonciation ont rendu mon silence moins lourd, allégé ma culpabilité de n’avoir pas su me protéger, de ne pas avoir été suffisamment forte. Surtout, vos témoignages m’ont permis de me rendre compte que je n’étais pas, malheureusement, une exception. Merci d’avoir soulevé la chape de plomb qui a longtemps étouffé nos voix. Je tenais à écrire ce témoignage pour dire ceci: les agresseurs ne sont pas toujours des hommes. Derrière une femme – officiellement hétérosexuelle – peut se cacher, un pédophile opportuniste. Les victimes quand à elles, ne sont pas toujours des enfants pauvres nées dans des familles à problèmes. Anonyme..
Source: témoignage publié avec la permission d’Ayawa’s, une marque engagée dédiée à la cause des femmes et enfants en situation d’abus. Au lieu de collectes de fonds pour mener des actions sociales, elle présente des produits locaux en édition limitée.
Vous pouvez retrouvez Ayawa’s comme blog sur Facebook
Crédits photos: Google images
Mots clés: abus sur mineurs; agressions sexuelles, pédophilie, femme pédophile; psychothérapie, résilience.
Avez-vous besoin d”informations, d’orientation ou d’un suivi psychologique ? Pour retrouver des psychologues à votre écoute, cliquez ici: https://www.monpsyonline.com/les-experts/
Je suis Samuella NOUMEDEM, psychologue basée à Douala au Cameroun et je réponds au +237 679972937. Cliquez ici pour me retrouver sur Whatsapp : wa.me/237679972937.
Comme beaucoup j’ai grandi loin de mon père, mais contrairement à Singuila, je n’ai pas cultivé de colère et je m’en suis plainte un peu quand même, intérieurement, quand j’étais petite. Et extérieurement plus tard quand il est revenu. Avec un petit peu de colère.
OK, commençons par le début.
Je suis née au sein d’un couple hétéro marié, qui avait déjà une fille, dont je suis la cadette. Je sais, dit comme ça c’est un peu… mais c’est exactement ça. J’adorais mon père, je vous le dis d’emblée. C’était genre ma mère m’achète un super truc et si quelqu’un me demandait qui me l’avait acheté je disais avec passion que c’était mon père. Ou s’il nous a emmenées UNE fois au cinéma, moi, je cultivais l’idée qu’il nous emmène SOUVENT au cinéma. Bref, vous voyez le genre. Alors, mon père n’était pas très présent, il se déplaçait souvent. Et puis un jour, il est parti en voyage et…il n’est pas revenu .J’avais 5 ans, ma petite sœur venait de naître. Des huissiers sont venus nous faire sortir de notre maison en catastrophe, un jour alors que ma mère était sortie pour le premier vaccin de ma petite sœur. Bon, ils l’ont quand même attendue.
Nous sommes allées vivre chez mes grands-parents maternels, ma mère, mes sœurs et moi. Ma mère ne travaillait pas à cette époque, mon grand-père un brave et adorable intellectuel, paix à son âme, était commerçant, il vendait des babouches en plastique, la générosité était presqu’un défaut chez lui. Ma grand-mère, une dynamique femme forte et authentique, paix à son âme aussi, était femme au foyer. Elle cultivait son champ, vendait la banane mûre et les ‘’miondos’’ qu’elle faisait elle-même pour joindre les deux bouts. Nous avons eu une enfance paisible auprès d’eux et par la grâce de Dieu, nous n’avons jamais manqué de rien. Ma mère, une vraie battante a retroussé ses manches et aligné jobs et petit commerce pour que nous allions à l’école, et que nous ayons toutes nos fournitures.
Le retour du « père » prodigue.
Dix ans plus tard, j’étais en classe de 2nde. Je suis rentrée de l’école un jour, Il n’y avait encore personne à la maison, ma mère avait trouvé un emploi stable depuis quelques années et rentrait en soirée. J’étais avec une camarade qui était venue m’emprunter un livre, pendant que je cherchais le livre pour lui donner, j’ai entendu frapper ; je suis allée ouvrir, et … c’était lui ! Mon père était là, devant le portail. Je lui ai évidemment sauté dessus après avoir crié ‘’papa’’, j’étais trop contente. Je l’ai fait entrer, et comme il tenait un sac, je lui ai demandé s’il restait, il a dit oui. J’ai rapidement remis le livre à ma camarade qui est partie. J’ai mis la Tv en marche, lui ai proposé ce qu’il y avait à manger et je suis allée apprêter la chambre ou il passerait la nuit (il y’avait une chambre inoccupée à l’extérieur). Mes sœurs sont rentrées tour à tour, ensuite ma mère en début de soirée et un peu plus tard ma grand-mère. A cette époque mon grand-père était déjà décédé. Il y’a eu une longue discussion entre les adultes dont nous les enfants n’avons jamais rien su.
A partir de là, nous avons sans autre forme de procès, commencé à vivre ensemble. Et le voile a très vite fait de tomber. Je vais être brève. Il était extrêmement négatif, par exemple la toute première semaine il m’a demandé de lui faire une lessive. J’ai pris ses vêtements, et je les ai lavés, avec tout mon amour. Grand fut mon choc de recevoir un pétage de plomb épique en guise de remerciement, à cause d’une petite déchirure apparue sur son pantalon. Selon lui, « j’ai sciemment déchiré son pantalon, pourquoi je suis mauvaise comme ça, je suis même quel genre d’enfant, si je ne voulais pas laver je n’avais qu’à dire, d’ailleurs que je ne touche plus à ses vêtements ». Waouh! J’étais sans voix. Il n’a m’a même pas voulu me laisser m’exprimer. Et la véhémence avec laquelle il affirmait sa version. C’était à croire qu’il y avait un autre problème. C’est fou comme dans une situation, il avait le don d’aller chercher la pire explication possible et s’y accrocher mordicus. Il avait toujours raison. Avec lui ce n’était pas possible de discuter, littéralement. Toujours entrain de vouloir créer un problème. Soit on est d’accord avec lui… soit on est d’accord avec lui.
Entre incompréhension, choc et désillusion…
Assez rapidement l’ambiance a commencé à changer à la maison. Il était envahissant, adepte des jeux de hasard. PMUC, parifoot par la suite et etc. Il monopolisait la télévision du matin au soir et du soir au matin, sans exagération. Il nous empêchait d’étudier: Le salon qui n’était pas grand nous servait de pièce d’étude et ce n’était pas possible d’être concentré avec le téléviseur en marche. Quand j’ai compris que pour pouvoir étudier j’allais devoir me lever en pleine nuit parce que c’est à ce moment qu’il n’était pas devant la télé, il a commencé à se lever à 3h du matin pour regarder la télé. Il passait ses journées à la maison, mangeait tout ce qu’il y’avait à manger sans égard pour nous qui allions rentrer de l’école, même pas pour ma petite sœur. Ma grand-mère laisse un truc au frigo ; il prend et quand elle vient se rendre compte que ça a disparu elle me gronde devant lui, il ne dit rien et se moque. Bien sûr, Il ne participait à aucune tâche, aucune charge, rien du tout. Ça devenait insupportable.
J’avais l’impression d’être la seule à vivre ce cauchemar parce que je refusais de me taire, et c’est moi qu’on grondait, quand j’essayais d’attirer l’attention sur son comportement. Ma mère ne prenait jamais ma défense, mais toujours la sienne : c’est ton père, tu dois le respecter. Elle a commencé à perdre de l’argent. Il n’y avait pas à chercher de midi à 14h, pour moi c’était clair et net. Nos livres de classes ont commencé à disparaitre. Très très clair et net. Je savais que c’était lui. Mais quand je l’ai dit ma sœur m’a regardé comme si je venais de blasphémer. Une longue liste d’autres effets s’est ajoutée au dossier des disparitions petit à petit. J’avais vraiment l’impression que j’étais la seule à le voir. Ma mère s’est mise à accuser un cousin à nous qui vivait pas loin et qui passait beaucoup de temps à la maison DEPUIS DES ANNEES dans la paix. Elle lui a donné (à mon père) de l’argent pour inscrire ma petite sœur à la rentrée, pour soit disant ’’l’impliquer’’, Il ne l’a pas fait.
Quand je préparais mon probatoire, à l’approche de l’examen un soir je n’en pouvais plus de cette histoire de télé qui m’empêche d’étudier : j’étais assise je travaillais dans le calme ; il est venu mettre la télé et a haussé le volume. Ma mère était aussi assise au salon, je la regarde, elle ne fait rien. J’insiste du regard, rien. Je me suis levée et je lui ai demandé s’il peut éteindre la télé, que je suis entrain d’étudier, je prépare mon examen. Il s’est levé et m’a criblé de gifles, jusqu’à me renverser. C’est quand je tombe que ma mère lui dit ‘’laisse comme ça’’. Un 24 décembre, ma petite sœur qui devait avoir 12ans, avait une sortie avec sa chorale, ils devaient chanter dans une autre église de la ville et elle l’avait dit à notre mère, je n’étais pas au courant et ma sœur ainée non plus. Leur monitrice avait loué un car pour le transport des enfants et devait ramener chaque enfant à son domicile au terme de la soirée. Ma mère a oublié. Ce jour-là, ma petite sœur s’est apprêtée et est allée à son programme. Vers 20h ma mère commence à nous appeler, où est votre sœur ? N’ayant aucune idée je commence à appeler ça et là, ma sœur aussi, et vers 21h la monitrice appelle donc ma mère (et c’est là qu’elle se rappelle) en ramenant ma petite sœur pour s’excuser du fait que le retour ait pris un peu plus de temps que prévu, ma petite sœur descendait la toute petite piste qui menait à la maison que mon père est sorti et l’a battue comme un bandit, coups de poing et tout. Malgré le fait que la monitrice a appelé pour justifier le retard. Et ma mère n’est pas venue l’arrêter.
Ma grand-mère est décédée quelques années plus tard et nous avons dû déménager, pour un appartement. Ma mère avait désormais plus de charges, loyer, eau et électricité (ce qui n’était pas le cas chez mes grands-parents) ma sœur ainée et moi à l’université, et ma petite sœur au lycée. L’atmosphère de plus en plus pourrie, on essayait de vivre dans la paix. Je l’évitais comme la peste. Zéro discussion. Bonjour / bonsoir. Ma sœur ainée et moi faisions des économies pour payer le câble, qu’on ne regardait presque pas. Une fois je ne sais plus à l’occasion duquel de ses emportements il m’a demandé de ne plus lui adresser la parole. Et je ne l’ai plus fait. Pendant un an. J’avais plus à me forcer à lui dire bonjour /bonsoir. Je pouvais l’ignorer royalement sans qu’on ne me prenne la tête. Hourra. Mais hélas. La réalité, toujours là pour vous assommer. Ma mère continuait de perdre de l’argent, entre autres choses. On le voyait même souvent en cachette fouiller dans ses affaires.
Une fois, on nous a coupé la ligne d’électricité sans crier gare, quand je vais à l’agence d’électricité pour essayer de savoir pourquoi, j’apprends que nous avons plus de six mois d’arriérés. Dépassée, j’appelle ma mère pour comprendre comment ça se fait, c’est là que j’apprends que depuis tout ce temps elle lui donne l’argent pour régler les factures.ET LE LOYER. On parle du gaz aussi ?passons. Quand j’ai dit à ma grande sœur qu’il fouillait nos chambres elle m’a regardé comme si j’avais dit une abomination. Mais je le savais. Un jour j’étais enfermée dans ma chambre, et il a dû se croire seul parce qu’il n’y avait personne d’autre. Je l’ai entendu entrer dans la chambre de ma petite sœur qui était consécutive à la mienne, vider sa petite caisse d’économies en bois, et ressortir. C’était affreux. Ma mère devenait aigrie, amère, négative. Elle s’emportait pour un rien, sur nous bien évidement.
A plusieurs reprises, ma grande sœur a essayé d’organiser une assise familiale entre nous, pour essayer de je ne sais même pas, faire quelque chose. Mais ça ne servait à rien, on ne faisait que gratouiller l’abcès, au lieu de le percer et extraire tout le pus qui avait déjà envahi partout. Personne ne voulait dire la vérité, du coup à chaque fois je me levais et je partais. Et on me prenait la tête pour ça, pour le fait que je ne voulais pas manger à table avec lui; ET pour un tas d’autres raisons qui me donnaient envie de hurler ‘’je ne peux pas faire semblant, je ne suis pas comme vous, je n’y arrive pas’’. Tellement de choses se sont passées, tellement…
Quand mon corps a commencé à parler…
En 3e année de fac, j’ai commencé à me sentir mal dans ma peau. J’étais très triste, déprimée, je me sentais grosse, j’étais très mal. J’ai entrepris de perdre du poids, mais je ne me sentais pas mieux, au contraire. J’ai commencé à avoir la digestion difficile, puis très difficile. Remontées acides aigues et incessantes, ballonnements constants, c’était infernal. Un oncle naturopathe m’a prescrit une série de médicaments de très bonne qualité, tout à fait indiqués pour mes symptômes qui m’ont grandement soulagé mais à très court terme. Mon ventre s’est ensuite mis à gonfler et c’était douloureux.
Je suis allée consulter un gastro-entérologue qui m’a fait une série d’examens (radio, échographie) qui ont n’ont rattaché aucune cause à tout cela. A l’époque, un proche dans mon entourage a suggéré que tout ce mal être dont je souffrais pouvait avoir une cause psychologique. J’en ai parlé à mon gastro-entérologue, qui a limite rigolé, et dit que ce n’est pas du sérieux ça, qu’il ne me conseille pas de m’embarquer là-dedans. Il m’a néanmoins prescrit un traitement, que j’ai également suivi. Sans grand succès.
A l’époque, Il n’y avait pas de psychologue dans le coin que je pouvais consulter, mais une psychiatre. Je suis allée la voir. Après la première séance elle a demandé à voir mes parents, et ils sont venus. Tous deux. Je sais, même moi je n’y croyais pas. Ce jour, quand ma mère est rentrée, elle m’a dit que la psychiatre leur a dit que c’est mauvais pour ma santé de vivre avec eux, que c’est leur’’ histoire’’ bref, toute cette histoire qu’on vit qui est en train de me rendre malade. Elle m’a demandé s’il y a quelqu’un dans la famille avec qui je peux aller habiter, que j’y réfléchisse et que je lui dise. Je lui ai dit non, que ça va aller, je ne vais pas sortir d’une sorcellerie pour aller entrer dans une autre. Lui par contre n’a fait aucun commentaire.
La douloureuse,mais salutaire acceptation de la réalité…
Au terme de la deuxième séance, j’ai eu l’impression qu’on m’a ôté un poids immense, sérieux, j’ai eu comme une révélation. Façon de parler. Nous avons juste discuté, mais j’ai pris conscience de certaines choses qui ont fait toute la différence par la suite. J’ai pris conscience que tout ça était vraiment, VRAIMENT derrière mon mal être, je veux dire, vraiment quoi. J’avais effectivement remarqué que l’atmosphère était malsaine à la maison, oui, comme un éléphant au milieu d’une pièce, difficile de louper. Mais que c’est ça qui me rendait malade, ça non. Mais encore, que ça m’affectait autant parce que j’aimais TOUJOURS beaucoup mon père. Quand elle a dit ça, j’ai vraiment eu l’impression que le temps s’est arrêté, parce que en toute honnêteté, c’était pas du tout de l‘amour que je ressentais le concernant. Enfin j’ai réalisé que je pouvais faire quelque chose. Je ne pouvais pas changer cet environnement dans lequel je vivais pour l’instant, mais je pouvais changer ma façon de réagir à tout cela. ET Ça m’a suffi. Juste deux séances. A partir de ce jour, et chaque jour par la suite, j’ai entrepris ce travail sur moi pour m’aider à m’élever au-dessus de tout ça. C’est un combat émotionnel et psychologique de longue haleine, c’est vraiment petit à petit, surtout quand on reste dans le même environnement et que les mêmes choses, voire pire continuent de se produire.
Un jour, où cette fameuse assise a eu lieu et que je lui ai dit tout ce que j’avais dans le cœur depuis toutes ces années, ce que tout le monde avait peur de lui dire. Quand j’ai fini, son visage était rouge et déformé de colère, sans exagération. Et quand je l’ai vu bondir du fauteuil j’ai senti que si je ne bouge pas ça va mal finir, j’ai à peine eu 3 secondes pour m’enfermer dans la première pièce venue. IL a essayé de défoncer la porte de son poids, en hurlant. Mes sœurs se sont fait mal en essayant de l’arrêter, il leur a donné des coups. Ma grande sœur est allée alerter un voisin pour venir l’arrêter. Ma mère n’était pas là, c’est elle qui a trouvé bon de sortir au début de l’assise cette fois. Je suis restée dans cette pièce jusqu’à ce qu’elle revienne. Pendant un bon moment on a veillé à ce que je ne me retrouve pas seule à la maison pour éviter le pire. Un ou 2 ans plus tard il a essayé de m’étrangler. Devant mon neveu de 3 ans.
Donc, oui, ça n’a pas du tout été facile, mais avec l’aide de Dieu, on y arrive petit à petit. On se rappelle chaque jour, de ne pas se laisser entrainer par la négativité, on se bat pour ne pas ruminer tout ça , que ce n’est pas contre nous, que ça ne durera pas éternellement, qu’on a encore toute notre vie à vivre, et qu’on ne va pas laisser ça nous prendre notre santé mentale et émotionnelle et nous gâcher nos futures relations. Les symptômes ont commencé à s’estomper et ont fini par disparaitre sans que je ne sache quand exactement. Et on finit même par voir le ‘’bon’’ dans tout ça. On finit par arriver à pardonner, vraiment pardonner. Ça prend du temps, mais oui, on finit par être libre de tout ce bagage malsain.
Mots clés: famille dysfonctionnelle, parent toxique, blessures d’enfance, somatisation, résilience.
Crédits photos: Google images, Unsplash
Avez-vous besoin d”informations, d’orientation ou d’un suivi psychologique ? Pour retrouver des psychologues à votre écoute, cliquez ici: https://www.monpsyonline.com/les-experts/
Je suis Samuella NOUMEDEM, psychologue basée à Douala au Cameroun et je réponds au +237 679972937. Cliquez ici pour me retrouver sur Whatsapp : wa.me/237679972937.